L’éclat étincelant de l’astre lunaire éclairait  de sa lumière opalescente  le dallage de marbre  de l’un des couloirs du Palais Royal.  Passage où l’effluve envoûtante des encens laissait son odeur évanescente se propager et que les pas feutrés de la semi-dragonne dissipaient à chacune de ses foulées. Émanation qu’elle laissait glisser diligemment sur sa peau laiteuse et sur toute sa silhouette déliée aux formes harmonieuses. La Kheradas avançait doucement en direction de ses appartements, son pas ferme  laissait juste entendre le cliquetis délicat de ses griffes et bijoux résonner  dans le silence prenant du lieu. C’était l’instant où toutes choses prenaient sa solennité et qui laissait les âmes reposer en paix le temps de quelques heures. Même la cité avait perdu de son agitation coutumière et les gardes du palais  étaient entre deux relèves.
Comme lors de chaque nuit, la morsure des ténèbres et des songes était son alliée. Soudain, elle stoppa sa marcha d’un mouvement brusque. Elle se campa fermement devant une lourde porte et dans un geste impérieux, elle éleva l’un de ses bras blanc, gantés de la nacre sombre de ses écailles crépusculaire, se saisir du loquet et d’ouvrir la porte de sa chambre. Princesse et Erudite de son peuple la dragonne avait droit à tous ce qui pouvait rendre attrayant l’un des lieux de vie d’un Kheradas.

En même temps que le seuil de ses appartements se révélait,  le museau blanc d’un canidé s’éleva ;  ses prunelles phosphorescentes azurines se plantèrent dans celles jumelles de sa propriétaire, qui esquissa un léger sourire en coin, où ses crocs blancs tranchèrent sur ses lèvres colorées de sombres.  « Et bien qui voilà... L’air vibra de la mélodie voluptueuse de la voix de la Kheradas ; pendant que l’animal se redressa et se dirigea vers sa maîtresse,  pressant ses hauts flancs duveteux contre les  jambes de la jeune femme
_ Heureux de te savoir ici Ryll » fit Aalana en grattant le menton du Marlyrr de ses griffes. Elle resta ainsi quelques instants à profiter de la présence de son familier.

L’hiératisme de son être se brisa. Son corps se remit en mouvement se dirigeant vers la commode où une immense glace lui faisait face. Avec des gestes précis, l’érudite défit les fibules qui étaient sur ses épaules et qui tenaient accrochées les pans de voile blanc qui couvraient diligemment son corps. La fine gaze glissa le long de ses flancs, se rependant en une corolle immaculée autour de sa personne. L’une de ses jambes longue et fuselée se souleva pour l’extraire des replis de son vêtement. Complètement nue face à son reflet, la lumière de la lune accentuait la blancheur nuageuse de son corps. Elle était comme translucide avec son auréole de cheveux blancs, ou quelques mèches d’un bleu sombre tranchaient dans ses douces ondulations qui s’écoulaient le long de son dos et qui mouraient au-delà du creux de ses reins.  Pourtant dans cette blancheur naît à la lisière de sa chevelure une couronne de corne obsidienne.
Personne dual, son visage ovale aux traits altier exprimait bien cette éternelle opposition entre le clair et l’obscure qui l’animait. Son front haut et ses arcades sourcilières étaient lisses de toutes expressions, laissant la limpidité de son regard brillant laisser sa marque. Pour souligner ses prunelles à la phosphorescence tranchante, un trait d’écaille sombre, tel du khôl souligne sa paupière mobile jusqu’au coin de l’œil. Un écho, cette fois-ci irisé, accentue ses hautes pommettes, ligne délicate qui remontait jusqu’à ses oreilles dédoublées où la première est faite de la même nacre et la seconde d’écaille sombre à l’image de ses cornes.  

Dans cette paix bénie qui était l’épilogue de ces fins de journée, l’érudite entendit, porté par l’écho des hauts murs de ses appartements, le pas d’une servante.  Dans une grimace de déplaisir, son nez se pinça de mécontentement et sa bouche se tordit. Les instants de grâce avaient prit fin. Tout du moins pour elle, car pour l’inconsciente petite humaine, elle agissait de bonne foi en venant dés l’arrivée de sa maîtresse, afin de s’enquérir de ses souhaits. « Bonsoir Madame, souhaitez-vous quelques choses ? Ces quelques mots vrillèrent les tympans de la Semi-dragonne, elle appréciait plus que tous la solitude et la paix, c’était une des raisons pour lesquels elle avait aimé, par le passé, son statut d’apprentie prêtresse.  Mais elle n’était pas faite pour cette vie de don soit et d’oubli de son ego.  _ De quoi boire serait parfait » Ces mots sortirent de ses lèvres, placides et impérieux. Elle n’avait pas besoin d’élever la voix pour que ses avis soient pris en compte, surtout au sein des serviteurs du palais. La dragonne était connue  pour être quelqu’un d’énigmatique, qui allie une personnalité changeante : passant du blanc au noir, sans raison apparente pour le commun des mortels. Mais ce ne serait que les morceaux d’une pièce qu’elle aurait savamment orchestré pour faire chanceler sa proie du moment. Masques qu’elle aime revêtir en société en fonction de l’utilité du moment.
La servante revint rapidement avec un verre en cristal qui contenait le précieux liquide d’un rouge profond. « Voici Madame, quelques choses d’autres vous ferait plaisir ? Aalana se saisit de son verre qu’elle porta à ses lèvres, laissant le liquide vital s’écouler dans sa gorge. Nonchalamment, elle s’était étendue sur un empilement de coussins multicolores à l’image de la personnalité de la Kheradas, bariolée et multiples.  _ Va-t-en laisse-moi respirer tranquille. » Mais au-delà des airs ingénus, naïfs, joueurs l’intelligence froide, le sérieux sont ses maîtres mots.

Chapitre I : Descendance des Dragons

Le jour qui l’avait vu naître n’était qu’une pale copie de bien d’autres. Bien qu’elle fût d’ascendance royale et que dans ses veines coulait le sang légendaire des dragons comme chacun des membres du peuple Kheradas, cela n’influençait en rien que ce fut une désillusion pour son père.  Ses premiers cris émis et son sexe défini tracèrent sa vie. Si elle avait été garçon son existence aurait pu avoir son poids et son importance pour le futur de la nation,  mais qu’elle fut fille la reléguait vers l’arrière-scène du jeu politique.
Première née d’Aegon frère du roi des Kheradas, deuxième dans l’ordre de succession au trône, si il avait eu un héritier avant son aîné, il aurait eu bien plus de poids dans ses propos  auprès de ses pairs. Mais ses espoirs furent que vétillent face à la réalité qui fut personnifiée par sa fille, Aalana. Elle était à l’image de sa mère : d’un blanc immaculé même si dans cette pureté Aegon pouvait percevoir quelques brides lui appartenant, ces éclats sombres qui tranchaient durement avec la pâleur de sa fille.  De ce petit être, il n’en avait que faire, mais il tâcha de faire assoir son autorité en lui offrant ce qui convenait pour un enfant royal.
Membre de la famille Régnante, Aalana eut les précepteurs qui lui enseignèrent ce que tous jeunes Kheradas devaient apprendre.

Chapitre II : Offrande au Dragon

A l’orée de sa soixantième année d’existence sa vie avait été toute esquissée, aînée des enfants Royaux, mais aucunement prise en compte dans la succession. Il était logique qu’elle apportât sa contribution à la société, ainsi lorsque dans son enfance elle émit le désir d’approcher davantage  de leur dieu créateur,  sa famille vint appuyer ses tendances jusqu’à la faire entrer dans les rouages de la religion pour qu’elle devienne Prêtresse. Elle aimait et respectait Kheradashulzâmn, ainsi elle n’émit aucune remarque.   Ce fut lors de ce premier cycle que naquît son cousin Ryld fils du monarque, il évinça définitivement les rêves de pouvoir d’Aegon qui n’avait pas su avoir un autre enfant depuis la naissance d’Aalana.

Chapitre III : Vers la Sagesse des Dragons ancestraux

Mais durant son premier cycle au Magistorat elle découvrit davantage que les simples perspectives spirituelles : l’approche des êtres et leur bien-être lui plaisaient, mais les contraintes qu’Aalana voyait poindre devant elle l’arrêtaient. Elle qui avait toujours eu l’habitude de tous posséder à un degré élevé, distinguait une vie d’altruisme fait d’abandon et en çà la semi-dragonne n’était pas prête.
Surtout que pendant les cinquante années passées à appréhender le premier cycle au Magistorat elle découvrit un vaste panel de connaissance qu’elle devrait également abandonner pour la vie religieuse, alors qu’elle n’avait qu’une seule et unique envie : continuer ! Ainsi, lorsque vint l’heure des choix la Kheradas décida de poursuivre et d’entrer dans le second cycle du Magistorat. Malgré les dires, les critiques de ses parents et de son entourage, elle avait décidé de continuer dans cette voie qu’elle voyait tracer à son intention. A partir elle se plongea dans les études avec un sérieux abattant les trois cycles à l’intervalle régulier de cinquante années, jusqu’au titre tant désiré d’érudit, avec comme spécialisation la manipulation des illusions. Domaine pour lesquelles elle s’était découvert une facilité et surtout un intérêt accru.

Chapitre IV : Par-delà la Sagesse des Dragons ancestraux

La suite de son histoire est fort simple et classique pour tous Kheradas, qui avaient réussi à terminer tous ses cycles au sein du  Magistorat. A partir du moment où elle eut fini d’apprendre ce qui était classique d’engranger dans ce lieu prestigieux elle contribua à son enrichissement, mais également elle perpétua l’apprentissage. C’est ainsi que se déroule sa vie : partagée entre les vieux livres, les voyages dans tous Nerÿe et toutes autres possibilités d’acquérir du savoir.